vendredi 30 juillet 2010

LA NEGRO RENAISSANCE AMERICAINE

LA NEGRO RENAISSANCE AMERICAINE

L’une des conséquences immédiates de la publication de « Ames Noires » de W E B DUBOIS a été la naissance à Harlem, d’un vaste mouvement social et culturel dans tous les domaines : littérature, théâtre, musique danse etc.
De nombreux jeunes noirs sont ainsi convaincus qu’ils appartiennent à une race qui a ses qualités et ses défauts –comme les autres- et qu’ils sont des êtres humains à part entière.
Sur le plan littéraire, de jeunes intellectuels noirs forment un groupe dénommé Renaissance Nègre ou Renaissance Américaine. Les plus connus sont Claude Mac Kay, Countee Cullen et Langston Hughes.
La Negro Renaissance réclamait pour les noirs les droits civiques comme le droit de vote, le droit à l’instruction etc. et avait pour objectif premiers la lutte contre :
- La discrimination (le racisme, la marginalisation des Noirs, l’aliénation.)
- La revendication de tous les droits particuliers accordés à tout américain de naissance.
- La réhabilitation de l’ensemble des valeurs relatives aux Noirs.

Le manifeste de la Negro Renaissance témoigne que le mouvement est résolument tourné vers l’avenir.
« Nous, créateurs de la nouvelle génération nègre, nous voulons exprimer notre personnalité noire sans honte ni crainte. Si cela plait aux Blancs, nous en sommes fort heureux. Si cela ne leur plait pas, peu importe. Nous savons que nous sommes beaux. Et laids aussi. Le tam tam pleure et le tam tam rit. Si cela plait aux gens de couleur, nous en sommes fort heureux. Si cela ne leur plait pas peu importe. C’est pour demain que nous construisons nos temples, des temples solides comme nous savons en édifier, et nous nous tenons dressés au sommet de la montagne, libres en nous même. »

LANGSTON HUGHES :( 1902 -1967)

« Moi aussi je suis l’Amérique »Extrait de « The Weary Blues »1926

I- Présentation de l’auteur :
Aperçu sur sa vie :
Né en 1902 dans l’Etat du Missouri, d’une mère noire et d’un père blanc. Langston Hughes connaît une enfance et une jeunesse marquées par la pauvreté de ses parents. Il commence à écrire très jeune. Autodidacte, il s’essaie à tous les métiers : livreur, cuisinier, mais aussi marin, ce qui lui a permis de découvrir la cote occidentale en 1932. Après quelques mois passés à Paris et en Italie, il rentre à New York où plusieurs de ses poèmes paraissent dans des revues. Au cours d’un séjour à Paris, il rencontre les poètes de la Négritude (Senghor, Damas, Césaire) .
Il est mort en 1967 en France.

Eléments Bibliographiques :
- The Weary Blues 1926
- The Negro Speaks of Rivers 1921
- Fines clothes to the Jew 1931
- Dear Lovely Death 1931
- The Dream Keeper 1932

II- Etude de texte : « Moi aussi je suis l’Amérique »Extrait de « The Weary Blues »1926


Texte: MOI AUSSI JE SUIS L´AMERIQUE
Moi aussi, je chante l'Amérique.

Je suis le frère à la peau sombre.
Ils m'envoient manger à la cuisine
Quand il vient du monde.
Mais je ris,
Et mange bien,
Et prends des forces.

Demain
Je me mettrai à table
Quand il viendra du monde
Personne n'osera
Me dire
Alors
« Mange à la cuisine ».

De plus, ils verront comme je suis beau
Et ils auront honte, -

Moi aussi, je suis l'Amérique.

A- Situation du texte :

Ce texte est un extrait de « The Weary Blues » publié en 1926 par Langston Hughes. Le poète s’identifie aux Noirs pour témoigner et pour créer : pour aider, eux aussi, à faire une Amérique plus américaine parce que plus humaine. Personne ne l’a fait mieux que Langston Hughes, le plus nègre et, en même temps, le plus américain des poètes négro-américains. Et le plus universel. Il revendique l'appartenance à la société américaine et leur identité noire; "moi aussi, je suis l'Amérique".

B- Etude détaillée :

Du premier vers au 7 vers, tous les verbes sont au présent de l’indicatif :un constat, une réalité
Le vers 1 est une reprise du titre que l’on retrouve aussi dans les derniers vers »Moi aussi je suis l’Amérique ».
L’utilisation du pronom personnel »Moi : objet et je : sujet » renvoie à la même personne : c’est la preuve que de liens solides existent entre le poète et la terre nourricière, l’Amérique, qui l’a accueilli, avec laquelle il semble se confondre.
« Je suis »→ la conjonction »aussi » révèle la force de l’appartenance du poète à la terre Américaine
Le poème est fortement dominé par la fréquence du »Je » dans plusieurs vers→ reflète l’appartenance du poète à la race noire. Le poète revendique sa place dans une Amérique partagée entre oppresseurs (Les Blancs) et opprimés (Les Nègres, victimes de la ségrégation raciale, de l’inégalité..).
« Je suis le frère obscur→ L’adjectif « obscur » renvoie à la couleur des Nègres, que les Américains (Blancs) assimilaient à la malédiction, à la condamnation.
Vivant du reste des repas, le poète fait allusion à la cuisine. Il nous montre la discrimination raciale par opposition au Blanc qui mange à table.
Nous avons également l’expression de la résignation, une expérience de vie du Nègre « Mais je ris, je mange bien et je prends de force »
Dans la seconde partie :
Une progression dans le futur. Le futur a valeur de certitude « Demain, je me mettrai à table ». Ces vers marquent une rupture avec l’état ancien du poète. Il détruit les liens de dépendance pour accéder à la place qui lui revient de droit.
Le processus de contestation est enclenché : « Personne n’osera/ me dire/Alors va manger à la cuisine»
Le poème se termine par le vers du début, ce qui suggère une impression de cercle dans lequel l’auteur se bat et se taille une part.

C- Conclusion :

Sur un ton assez léger, le poème est une revendication de toute la race noire dont le poète est le porte-parole et un appel à l’élan de fraternité. C’est aussi la preuve de l’engagement de Hughes dans la longue lutte pour la reconnaissance de l’homme noir.